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Les fiançailles

  La dernière semaine de vacances s’ouvre sous un ciel d’une clarté trompeuse, un bleu profond et uniforme qui s’étend au-dessus du palais de Qit comme une toile tendue, masquant les remous qui agitent déjà les c?urs et les esprits. Ce d?me céleste, d’une perfection presque irréelle, semble suspendu au-dessus des tours effilées, ses nuances vibrantes contrastant avec les ombres longues qui s’étirent sur la pierre blonde des murailles. Pour Mero, ces derniers jours d’été portent une promesse ambigu? : celle d’un répit qui s’achève, fragile comme une feuille d’automne prête à tomber, mais aussi d’un événement inattendu dont les contours restent flous, flottant dans son esprit comme une brume matinale. Une brise tiède traverse les jardins impériaux, caressant les feuilles luisantes des orangers et des jasmins, dont les parfums sucrés – un mélange enivrant d’agrumes et de fleurs – se mêlent à l’odeur saline et vive portée par les vents marins depuis la c?te toute proche. Les pelouses, soigneusement entretenues, s’étendent en vagues vertes et soyeuses jusqu’aux murailles du palais, où la pierre, patinée par des siècles d’intempéries, scintille sous les rayons obliques du soleil couchant, ses reflets dorés dansant comme des flammes sur un miroir. Ce paysage, d’une beauté presque insolente, semble pourtant retenir son souffle, figé dans une attente silencieuse, comme s’il pressentait la gravité de ce qui se prépare à l’intérieur des murs imposants.

  Le palais de Qit, avec ses tours élancées qui percent le ciel et ses d?mes élégants aux courbes harmonieuses, se dresse au sommet d’une colline dominant la vallée, un géant de pierre veillant sur les terres fertiles en contrebas. Ses murs, incrustés de mosa?ques aux reflets d’or et d’azur, captent la lumière dans un éclat qui évoque une couronne sertie de joyaux posée sur la terre. Ces mosa?ques, chef-d’?uvre d’artisans oubliés, dépeignent des scènes de légendes anciennes : des guerriers en armure brandissant des lances sous des cieux tourmentés, des créatures ailées aux écailles scintillantes, et des souverains aux visages sereins offrant des présents aux dieux. Des balcons ouvragés, ornés de ferronneries délicates en forme de volutes florales, surplombent des cours intérieures où des fontaines murmurent sans relache, leurs eaux cristallines jaillissant en arcs gracieux pour retomber dans des bassins de marbre blanc, scintillant comme des joyaux liquides sous les rayons du soleil. à l’approche de la grande salle, les pas de Mero résonnent sur les dalles de marbre poli, un écho clair et rythmé qui se perd dans l’immensité des couloirs vo?tés, amplifiant le sentiment de solitude qui l’étreint. Les tentures pourpres qui ornent les murs frémissent légèrement sous l’effet d’un courant d’air invisible, leurs broderies dorées – des entrelacs de vignes et de couronnes – captant la lueur vacillante des candélabres. Ces derniers, forgés en fer noir et sculptés en formes de serpents enroulés, projettent des ombres dansantes sur les murs, des silhouettes mouvantes qui semblent murmurer des secrets d’un autre temps. Tout dans ce lieu respire la majesté, une grandeur écrasante qui impose le respect, mais aujourd’hui, une tension sourde s’y est insinuée, un pressentiment diffus que quelque chose d’irréversible est sur le point de se produire, suspendu dans l’air comme une note dissonante.

  Mero avance aux c?tés de Mandarine, sa présence à la fois réconfortante et troublante, un phare dans la tempête qui gronde en lui. Ses doigts effleurent les siens, un geste discret mais chargé d’une émotion qu’il peine à nommer – un mélange de tendresse, de crainte et d’espoir entrelacés. Elle reste silencieuse, ses yeux scrutant les détails du palais avec une curiosité mêlée d’appréhension, ses prunelles sombres captant les reflets des mosa?ques et des flammes. Sa robe légère, d’un beige doux orné de broderies florales, flotte légèrement autour d’elle, accentuant la grace naturelle de ses mouvements. Les domestiques, d’ordinaire loquaces et prompts à échanger des plaisanteries, glissent comme des ombres le long des murs, leurs visages fermés et leurs gestes précis trahissant une nervosité inhabituelle. Vêtus de tuniques anthracite aux boutons d’argent, ils portent des plateaux vides ou ajustent les tentures avec une diligence presque mécanique, évitant les regards comme s’ils craignaient de trahir un secret trop lourd. Lorsqu’ils atteignent la grande salle, Mero sent son c?ur s’alourdir, une pression sourde qui comprime sa poitrine. La pièce, immense et solennelle, est un écrin de splendeur : des tapisseries anciennes, tissées de fils d’or et d’argent, relatent les triomphes passés de l’empire, leurs couleurs fanées par le temps mais encore vibrantes, tandis que le plafond vo?té, peint d’étoiles et de constellations délicatement tracées, semble juger l’assemblée de son regard éternel, un firmament immobile observant les mortels en contrebas. Une longue table d’ébène tr?ne au centre, sa surface lisse et sombre réfléchissant la lumière comme un lac noir, mais elle est vide, accentuant l’impression d’un moment suspendu dans le temps, un instant figé avant une chute inévitable.

  La famille impériale est déjà réunie, leurs silhouettes alignées en un demi-cercle imposant, une fresque vivante de pouvoir et de retenue. Le roi de Qit, impassible comme une statue taillée dans le basalte, se tient près de l’empereur, son visage émacié et ridé ne laissant rien deviner de ses pensées, ses yeux gris per?ants comme des lames scrutant l’horizon invisible. Sa cape bleu nuit, bordée de fourrure, tra?ne derrière lui, un symbole de son autorité inébranlable. Dorian, les épaules droites mais le regard perdu dans une rêverie mélancolique, contraste avec Ki, dont le calme apparent – une surface lisse cachant des eaux profondes – dissimule une force intérieure que Mero a appris à reconna?tre. Ki porte une tunique verte aux reflets soyeux, ses cheveux blonda tressés avec des perles qui scintillent à chaque inclinaison de sa tête. Hélène, quant à elle, observe la scène avec une retenue étudiée, ses mains croisées devant elle comme pour contenir une tempête intérieure, ses doigts fins crispés sur le tissu de sa robe pale. L’air est lourd, saturé d’attente, et Mero sent une boule se former dans sa gorge, une tension qui monte comme une vague prête à déferler. Il échange un regard avec Mandarine, dont les yeux brillent d’une lueur inquiète, un éclat fragile qui trahit ses pensées tumultueuses, et il resserre doucement sa prise sur sa main, cherchant autant à la rassurer qu’à puiser du courage dans ce contact.

  L’empereur se lève enfin, sa silhouette imposante drapée dans une cape de velours noir rehaussée de broderies dorées qui scintillent comme des étoiles tombées sur la nuit. Son mouvement fait bruisser le tissu, un son grave et profond qui résonne dans le silence oppressant de la salle, brisant l’immobilité comme un coup de tonnerre lointain. Ses yeux, per?ants comme ceux d’un faucon traquant sa proie, balayent l’assemblée, s’attardant un instant sur chaque visage avec une intensité qui glace le sang. Lorsqu’ils croisent ceux de Mero, il sent un frisson le parcourir, une sensation de vulnérabilité face à cet homme dont chaque parole est une arme aff?tée, chaque regard un jugement. Puis, d’une voix grave et mesurée, l’empereur annonce un bouleversement majeur, un événement qui redessinera l’avenir des royaumes et des terres du nord, ses mots résonnant comme un glas dans l’immense salle. Les mots tombent comme des pierres dans un étang immobile, créant des ondes qui se propagent dans les esprits, et une brise froide, surgie de nulle part, fait vaciller les flammes des chandelles, projetant des ombres mouvantes sur les murs, des formes indistinctes qui dansent comme des spectres invoqués par la gravité de l’instant.

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  Avec une solennité qui glace le sang, l’empereur révèle un secret longtemps gardé : un mariage impérial, destiné à sceller l’union des royaumes dans un geste de paix et de prospérité, une alliance tissée dans l’ombre et dévoilée à la lumière. La salle semble retenir son souffle, l’air figé dans une attente presque palpable, et Mero sent son pouls s’accélérer, un battement sourd qui résonne dans ses tempes. Qui sera concerné par cette alliance ? Ses yeux se posent tour à tour sur les princes et princesses, cherchant des indices dans leurs expressions – un tressaillement, un regard fuyant, un sourire contenu. Dorian reste immobile, mais une lueur traverse son regard, une étincelle de compréhension ou d’anticipation, tandis que Ki baisse légèrement les yeux, ses lèvres pincées comme si elle portait déjà le poids de la nouvelle. L’incertitude pèse sur Mero comme une chape de plomb, et il se surprend à imaginer ce que cela pourrait signifier pour lui et Mandarine, dont l’avenir reste suspendu à des fils fragiles, des liens d’espoir et de crainte entremêlés dans son c?ur.

  Dans un geste théatral, l’empereur désigne Ki de Qit, et Dorian, prince de Fine, comme les fiancés de cette union historique, sa main se levant avec une grace calculée pour pointer les deux figures au centre de l’assemblée. Le roi de Qit incline la tête en signe d’assentiment, un mouvement presque imperceptible sous le poids de sa couronne, tandis qu’Hélène et les autres membres de la famille impériale observent en silence, leurs réactions oscillant entre surprise et résignation, leurs visages comme des masques sculptés dans la pierre. Mero sent une vague d’étonnement le submerger, suivie d’une étrange chaleur qui se répand dans sa poitrine – un mélange de joie sincère pour ses amis et d’un pincement fugace d’envie. Il est heureux pour Dorian et Ki, dont l’amour a triomphé des intrigues et des calculs froids du pouvoir, mais cette félicité est teintée d’un élan de gratitude envers Mandarine, toujours à ses c?tés, sa main chaude dans la sienne comme une ancre dans la tempête.

  Les invités échangent des regards, l’étonnement cédant peu à peu à des murmures étouffés qui bourdonnent dans la salle comme un essaim discret. Mandarine serre la main de Mero, et il per?oit dans ce geste une question muette : Et nous ? – une interrogation qui flotte entre eux, aussi délicate qu’un pétale porté par le vent. Personne n’avait anticipé ce tournant, et pourtant, il semble porter en lui une promesse d’avenir, un horizon nouveau qui se dessine dans les ombres du palais. Ce mariage, à la fois politique et symbolique, pourrait bouleverser l’histoire de l’empire, un fil d’or tissé dans la trame complexe des alliances, mais il soulève aussi des interrogations qui dansent dans l’esprit de Mero : comment les autres factions, tapies dans l’ombre, réagiront-elles à cette union ?

  Dorian, radieux, ne semble pas surpris, son visage illuminé par une joie contenue qui éclaire la salle comme un rayon de soleil per?ant les nuages. Depuis les funérailles où Ki l’avait soutenu, un bras ferme autour de ses épaules tremblantes, des tractations avaient débuté avec le roi de Fine, son frère a?né, des murmures d’alliance échangés dans les couloirs sombres du pouvoir. Mero observe son ami, dont le bonheur semble déteindre sur l’assemblée, et un sourire se dessine sur ses lèvres, un élan spontané de camaraderie et d’espoir. Voir un amour véritable s’épanouir au milieu des calculs politiques est une rareté, un signe que les temps évoluent, que les murs de pierre et de méfiance peuvent s’effriter sous la force des c?urs. Les festivités reprennent, teintées d’un enthousiasme nouveau, et le palais s’anime de préparatifs joyeux : des rires s’élèvent, des verres s’entrechoquent, des étoffes colorées sont déployées pour célébrer l’union à venir. Pourtant, pour Mero, la journée s’écoule dans une douce torpeur, partagée entre la célébration extérieure et une introspection silencieuse, un refuge dans ses pensées où il pèse chaque mot, chaque regard échangé avec Mandarine.

  Un calme profond l’envahit, une sérénité qu’il n’avait pas ressentie depuis longtemps, comme une mer apaisée après des mois de tempête. Cette union entre Dorian et Ki pourrait ouvrir la voie à son propre mariage avec Mandarine, une alliance que l’empire, dans ce climat de renouveau, pourrait enfin accepter sans froncer les sourcils, un rêve qu’il caresse depuis des lunes dans le secret de son c?ur. L’idée que l’amour puisse transcender les frontières et les stratégies le réconforte, une lumière douce dans l’obscurité des intrigues, et il imagine un futur où lui et Mandarine pourraient s’unir sous ces nouveaux auspices, leurs mains liées sous un ciel étoilé semblable à celui peint au-dessus d’eux. La brise qui traverse les fenêtres ouvertes apporte une fra?cheur bienvenue, caressant son visage comme une promesse murmurée, et Mero ferme les yeux un instant, laissant les sons du palais – rires cristallins, cliquetis de verres, murmures feutrés – l’envelopper comme une étoffe soyeuse, un cocon de possibilités.

  Mais une pensée persiste, tenace comme une ombre dans la lumière : rien, avec l’empereur, n’est jamais simple. Ce mariage, aussi sincère soit-il dans les c?urs de Dorian et Ki, s’inscrit dans un plan plus vaste, une toile d’araignée tissée avec une précision machiavélique. En unissant des royaumes, l’empereur pourrait chercher à apaiser les tensions qui grondent au sein de l’empire – des rivalités anciennes, des ambitions étouffées sous des sourires de cour – renfor?ant son pouvoir tout en désarmant ses adversaires dans un même mouvement élégant. Mero admire cette finesse stratégique, cette capacité à transformer une union d’amour en un levier politique, mais elle le rend aussi vigilant, ses sens en alerte comme ceux d’un chasseur dans une forêt inconnue. Chaque geste de l’empereur est un coup d’échecs, une pièce déplacée avec une intention cachée, et lorsqu’on croit en saisir la portée, il a déjà avancé ailleurs, son regard fixé sur un horizon que nul autre ne peut voir. Dans ce jeu complexe, Mero sait qu’il doit rester alerte, prêt à saisir les opportunités qui se présenteront pour protéger son avenir avec Mandarine, un trésor qu’il refuse de laisser glisser entre ses doigts.

  La nouvelle de l’engagement marque un tournant, un pivot dans le grand échiquier politique où chacun trouve sa place, volontairement ou non. Pour Mero et Mandarine, la question de leur propre union devient plus pressante, un fil tendu au-dessus d’un précipice, alors que les rivalités internes de l’empire s’intensifient, des braises prêtes à s’enflammer sous le moindre souffle. L’empereur, toujours en avance, semble avoir tout prévu, ses yeux per?ants scrutant l’avenir avec une clarté que Mero envie et redoute à la fois, et Mero se retrouve au c?ur de cette toile de stratégies, un pion ou un joueur, il ne sait pas encore. Avec Mandarine à ses c?tés, la dynamique change, son souffle léger contre son épaule devenant une force qu’il puise dans les moments de doute. Comment naviguer dans ce labyrinthe de pouvoir, où chaque couloir peut mener à une impasse ou à une porte ouverte ? Comment aborder leur avenir dans un contexte aussi complexe, où l’amour et la politique s’entrelacent comme des ronces ? Peut-être que leur mariage, dans ce cadre mouvant, devient une étape cruciale, non seulement pour eux, mais pour la stabilité de l’empire, une pierre posée dans un édifice fragile. Quelles décisions Mero prendra-t-il, maintenant que les enjeux se dessinent avec une clarté nouvelle, des lignes nettes tracées dans le sable mouvant de l’incertitude ?

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